LETTRE SUR LE PRET A INTERET. 231 lement des principes d’économie politique qui doivent présider à l’é-tablissement des voies de communication, mais encore des règles d’équité et de justice qui doivent diriger le gouvernement dans la ré-partition du produit des impôts entre tous les membres de la vaste association qui forme la nation. DUPUIT, Ingénieur en chef des ponts et chaussées.
LETTRE SUR LE PRÊT A INTÉRÊT.
À Monsieur le rédacteur ea chef du Journal des Economistes.
Le capital doit-il ou non porter un intérêt ? Telle est la grosse question qui
sépare l’économie politique du socialisme de M. Proudhon.
Un de nos savants collaborateurs, M. Fr. Bastiat, a publié récemment une
brochure pour réfuter l’hérésie économique de M. Proudhon *.
Selon M. Proudhon, l’intérêt n’est qu’une plante parasite, une sorte de gui
malfaisant qui s’est attaché au tronc de l’arbre de la production et qui en dérobe la sève, mais que l’on peut abattre aisément d’un coup de serpe. La
serpe de M. Proudhon, c’est la Banque d’échanges.
Selon M. Bastiat, l’intérêt est inhérent au capital ; on ne peut en aucun cas
l’en détacher sans détruire le capital même : les capitaux ne s’accumulent
qu’en vue d’une rémunération (page 40). S’il n’y avait plus d’intérêt, il n’y
aurait plus de motifs d’épargne ( page SO) ; en deux mots, l’intérét ou la rente
est la RAISON d’être de l’épargne (page 43). À quoi M. Bastiat ajoute que
l’intérêt a pour objet de rémunérer le service rendu par le prêteur à l’emprunteur.
Si la théorie de M. Proudhon est notoirement fausse, celle de M. Bastiat ne
me paraît pas non plus parfaitement exacte.
À mon avis, Turgot s’est beaucoup plus approché de la vérité dans ce passage :
« « Les capitaux nécessaires à tous les négociants ne peuvent leur être confiés
par les propriétaires qu’autant que ceux-ci y trouveront un avantage capable
de les dédommager de la PRIVATION d’un argent dont ils pourraient user, et des
RISQUES attachés à toute entreprise de commerce *. »
Néanmoins, l’analyse de Turgot est incomplète. L’illustre auteur du Mémoire
sur les préts d’argent a négligé de mentionner, dans les frais de production de
l’intérêt, le travail du préteur, a peine que se donne le prêteur en prêtant ; il
n’a pas davantage tenu compte des éléments négatifs du prix de l’intérêt.
Je vais m’efforccr, monsieur, d’analyser et de rassembler les parties consti
’ Capital et rente. — Chez Guiliaumin et comp.
’ Mémoire sur les prêts d’argent, 1. 1", p. 119, édit. Guiliaumin.