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piâte ; perdu, padiu et poédi. Les Espagnols ont quelque chose d’analogue ; du latin porta, porte, ils font puerta, de hortus, jardin, huerta.

Si de horridus le vieux français a fait orde, d’autres groupes de populations, conservant le génie traditionnel de la prononciation[1] de certaines syllabes, en ont pu faire aussi légitimement le mot ouete, par l’emploi du double procédé dont je viens de parler.

Dans le patois picard je trouve wouadi, sali, tout mouillé, couvert de boue.

Nonon ou nonnon, oncle. Ce mot me semble tout à fait particulier au sud de la Lorraine. Ce n’est pas que le mot oncle, dérivé d’avunculus, n’existe pas dans notre patois. Nous y trouvons le mot oncla, mais plus souvent avec le sens de vénérable, de vieux, de père. C’est un terme de vénération qui ne s’adresse guère qu’aux vieillards et ne rappelle pas une idée de parenté. Le patois franc-comtois oncliot et le mot anglais uncle s’emploient dans le même sens. Ainsi on a passé de l’idée de parenté à celle de vénération. Par un raisonnement inverse, le patois vosgien a donné à un terme de respect un sens de parenté ; il désigne l’oncle par le mot nonnon. Or

  1. « Chaque peuple a dans l’oreille des sympathies et des antipathies, et dans l’organe de la voix des tendances particulières, des instincts d’où résultent les caractères de son langage. » Génin, De la prononciation du vieux français.)