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gestes et connaître le personnage dont il s’agit. Si nous l’avons écrite ici, c’est qu’elle est courte, et que notre but n’est pas de donner non des modèles de littérature patoise, mais des exemples du langage seulement.

Nous dirons un jour quelques-unes de ces histoires de veillées qui ont leur origine dans les fabliaux ou dans les contes fantastiques de la superstition du moyen-âge.

Il est des veillées où les conteurs appellent l’attention d’une manière assez bizarre qui nous rappelle le cric ! crac ! des marins. C’est ainsi qu’à Epinal nous avons souvent entendu la formule singulière que voici et qu’il nous sera permis de ne pas traduire :

Fiauve ! Fiauve !
Not’ chet’ pess’ l’auve.
Lo eu li gotte ;
Ç’o pou far d’lè sope,
Et lo rogotion
Ç’o pou Joson.

A ces paroles sacramentelles le silence s’établit, chacun prend sa place, et le travail qui ne cesse pas ne couvre jamais la voix du conteur. Ces veillées ne sont nullement oisives. Si le rouet, le tricot ou l’aiguille des femmes montrent le plus d’activité, l’ouvrage ne manque pas aux jeunes garçons. Quant aux bons vieux, ils se tiennent généralement près du feu de l’âtre et fument leur pipe en écoutant, ou dorment d’un œil pour surveiller la jeunesse de l’autre.