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Page:Jouvet - Réflexions du comédien, 1938.djvu/104

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période militante ne sera décidément pas suivie d’une période triomphante.

À peine a-t-on clos ses yeux que son ennemi capital, celui qui, tout au long de sa vie, l’a irrité par sa toute-puissante critique, Francisque Sarcey, meurt à son tour, et la nécrologie de l’oncle Sarcey remplit toute la presse. Et ce pauvre Becque, disent les journaux de l’époque, qui fut malheureux toute sa vie, n’a même pas eu la satisfaction d’avoir eu beaucoup de monde à son enterrement.

Huit Jours après, on brise les scellés apposés, disent les gens de loi, « sur l’appartement d’un célibataire sans postérité et sans ascendants ». L’inventaire stipule : « On a trouvé dans une pièce du fond un buste du défunt, un pot-au-feu et un matelas, le tout prisé 0 fr. 50. » Le buste était l’œuvre de Rodin. « Une bibliothèque : 30 francs. Une valise et quatre serviettes : 2 francs. Plus trois bouteilles de vin Mariani. »

Qu’est-ce que vous dites de ça ?

Le défunt laissait 53 000 francs de dettes.

Croyez-vous que c’est drôle ?

Ce n’est pas fini.

1904. — La concession achetée au cimetière du Père-Lachaise par la Société des Auteurs prend fin. On veut donner à Becque une sépulture définitive, mais son corps reste introuvable à sa place, dit le journal Le Temps ; dans la bière qu’on regardait comme la sienne, un capitaine de gendarmerie dormait son sommeil sans fin.