Page:Jules Feller - Essai d’orthographe wallonne, 1900 (in BSLLW t. 41 p.1-237).djvu/11

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Placé dans l’alternative ou de n’offrir à l’œil qu’ine tachygraphie confuse ou d’écrire exclusivement pour l’oreille[1], j’ai préféré le dernier parti. Je ne viole pas le système orthographique, puisque nous (c’est-à-dire le wallon) n’en avons point : il n’existe qu’une sorte de routine dans nos petits ouvrages écrits en wallon : leurs auteurs, voulant composer avec l’orthographe française, ne marchent qu’en tâtonnant, et par cette méthode injudicieuse, ils rendent plus pénible une lecture qui, dans toutes les hypothèses possibles, sera toujours difficile ». Ainsi Remacle voit très bien le danger de composer avec l’orthographe française, de calquer le wallon sur le français ; mais il ne suit pas tant les suggestions de son oreille qu’il le croit. En haine de l’analogie et pour faire paraître sa langue plus originale, c’est avec bonheur qu’il s’écarte du français. On dirait même que tel est le vrai mobile inconscient de ses transformations.

[Les finales.]

Remacle supprime les consonnes muettes finales et l’e muet, mais sans y mettre beaucoup de régularité. Parfois il substitue d’autres consonnes à celles qu’il supprime, ou dénature enfin les suffixes à plaisir, taquinant l’analogie légitime et obéissant à son insu à d’autres analogies superficielles et illogiques, dont les auteurs sans connaissances grammaticales sérieuses sont trop souvent le jouet. Voici des exemples de chaque cas :

Suppression de la consonne finale : creu (croix), edreu (endroit), efan (enfant), eclo (enclos), nigo (nigaud), frico (fricot).

Conservation de la consonne finale dans -et : chet (chat), boket (morceau), coirnet (cornet).

  1. Il n’y a point d’alternative là-dedans. C’est pour l’oreille, et non pour l’œil, que l’on supprime des voyelles dans l’écriture, que l’on figure les formes toutes contractées et que l’on fait ce que Remacle appelle une tachygraphie confuse. Écrire exclusivement pour l’oreille, c’est courir le risque de ne pas satisfaire assez l’œil. Remacle voit bien à tort une alternative cruelle et des systèmes opposés où il n’y a que synonymie.