Page:Jules Lachelier - Du fondement de l'induction.djvu/6

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

6 DU FONDEMENT DE L'INDUCTION

cette hypothèse, la totalité des faits passés : mais un seul fait bien observé nous paraît une base suffisante pour l’établissement d’une loi qui embrasse à la fois le passé et l’avenir. Il n’y a donc pas de conclusion proprement dite des faits aux lois, puisque l’étendue de la conclusion excéderait et, dans la plupart des cas, excéderait infiniment celle des prémisses. D’ailleurs, chaque fait, considéré en lui-même, est contingent, et une somme de faits, quelque grande qu’elle soit, présente toujours le même caractère : une loi est, au contraire, l’expression d’une nécessité, au moins présumée, c’est-à-dire qu’elle porte que tel phénomène doit absolument suivre ou accompagner tel autre, si toutefois nous n’avons pas pris une simple coïncidence pour une loi de la nature. Conclure des faits aux lois serait donc conclure, non seulement du particulier à l’universel, mais encore du contingent au nécessaire : il est donc impossible de considérer induction comme une opération logique.

Quant à l’autorité d’Aristote, elle est beaucoup moins décisive sur ce point qu’elle ne semble sa premier abord. Il est évident, en effet, qu’Aristote n’a pas admis sérieusement que l’homme, le cheval et le mulet fussent les seuls animaux sans fiel, ni qu’il fût possible, en général, de dresser la liste complète des faits ou des individus d’une espèce déterminée : le syllogisme qu’il décrit suppose donc, dans sa pensée, une