Page:Jules Mary - Les écumeurs de guerre.djvu/178

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
176
LES ÉCUMEURS DE GUERRE

Elle parlait du document, à mots couverts, car il ne fallait pas que les ennemis pussent comprendre, si la lettre tombait entre leurs mains.

Elle disait comment elles vivaient, leurs privations, et comment elles étaient, sans pitié pour leur faiblesse, condamnées à de durs travaux.

Et c’était ainsi que sa protestation ardente s’était envolée de ses mains et, à travers les dangers, dans bien des cahots et des tempêtes, était venue enfin, presque miraculeusement, se poser sous les yeux de Simon.

Combien de fois il la relut…

Puis, à côté de tant de joie, quelle douleur et quel deuil, et quelle rage de vengeance aussi en apprenant que son père avait été assassiné !

Les heures de la nuit s’écoulèrent… Il ne ressentait pas le besoin de dormir… Ce ne fut que vers le matin que le sommeil l’emporta et qu’il se jeta sur son sommier.

Au réveil, la pluie continuait sans arrêt. Le sol, saturé, laissait couler dans la cagna un liquide blanchâtre détrempé dans la chaux. La voûte de terre, mal étayée, se crevassait et menaçait ruines. Rameau s’évertuait à réparer le dommage, vidait l’eau avec une pelle, déblayait au dehors les rigoles d’écoulement.

Et, appuyé sur son coude, ayant encore quelques minutes de repos, Simon rêvait, en relisant, pour la dixième fois, la lettre de Rolande.

Après la joie de l’avoir ainsi retrouvée, et retrouvée vivante, une douleur profonde qui venait de son deuil…

Au souvenir de son père, du brave homme si tendre qu’était le paysan, son cœur se fendait, et il pleurait, car dans ce cœur rude, il savait ce qu’il y avait de dévouement et d’affection, et combien Jean-Louis était fier de son fils.

Et parmi les réticences de la lettre, parmi cer-