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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

le danger était moins redoutable lorsqu’il pouvait le voir naître, et s’épanouir.

Il n’avait pas été, ensuite, sans remarquer que l’officier avait produit sur Isabelle une impression profonde. Outre que, dans l’adoration qu’il avait pour sa fille, il était incapable de lui résister ni de lui donner des ordres, il ne voyait pas sans plaisir cette liaison s’ébaucher. Il l’avait dit à Nicky Lariss. C’était une sécurité de plus.

Impuissant, la rage au cœur, Nicky Lariss avait assisté, de loin, au développement de cet amour.

Isabelle, du reste, ne s’en cachait pas. Elle n’en avait pas la force. Prise dans tout son être, dès les premiers jours où elle s’était vue au chevet de l’officier, elle s’était abandonnée à l’attrait qu’il lui inspirait.

Elle ne se fiait à personne et prenait pour elle les soins à lui donner.

Ses visites régulières et qui même se renouvelaient sans raison et pour le moindre prétexte, ses attentions délicates, comme ses regards et ses attitudes attendries, quand elle se penchait sur le malade, tout en elle trahissait si bien le sentiment profond qui envahissait ce cœur de femme, que son amour bientôt ne fut plus un secret pour les blessés.

Entre eux, il en plaisantèrent d’abord.

Mais ils n’osèrent en parler à Simon.

Simon, en effet, ne s’apercevait de rien.

Dans les premiers temps, comme il souffrait beaucoup, comme sa vie était en danger, et comme le bruit courait que, même s’il était sauvé, il resterait très faible, avec des poumons délicats, une grande pitié avait entouré cet empoisonné.

Plus tard, lorsque presque miraculeusement — et on ne se gênait pas pour dire qu’Isabelle était l’auteur du miracle — il fut debout, faisant mentir tous les pronostics, son allure fut si réservée, ses yeux res-