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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

Et c’est alors seulement qu’elle retira sa main.

— Je vous demande pardon… monsieur… de vous avoir laissé deviner… de n’avoir pas su me taire… Une jeune fille française aurait eu plus de réserve, je le comprends… mais cette séparation brusque !… la fièvre des événements qui se passent… de ceux qui sont attendus… et surtout la certitude que demain vous serez loin de nous et que ce sera fini… tout cela fait que…

Elle se tut.

On devinait que si elle avait continué de parler les larmes auraient coupé sa voix… Simon, grave, la plaignait… si franche dans son aveu, et surtout si prête à la souffrance…

Ils s’étaient rapprochés de la fenêtre tout en causant.

Un bruit de pas, en bas du château, sur les allées, attira l’attention du jeune homme… une attention de curiosité machinale et de pensée absente.

Une jeune fille, d’un pas alerte, un portefeuille en cuir sous le bras, suivait les contours des massifs sur lesquels s’abattait de temps en temps, comme à regret, quelque feuille morte que l’automne détachait des arbres.

Elle était enveloppée, à cause de l’humidité du brouillard qui tombait en gouttes de pluie chaque fois qu’un peu de vent secouait les branches, d’un grand manteau de caoutchouc dont le capuchon était relevé sur sa tête nue.

Comme elle tournait le dos, Simon ne pouvait voir ses traits.

Et, du reste, il n’arrêta pas sur elle son regard et le détournait déjà lorsqu’un détail, un geste, une attitude rapidement surprise, éveilla soudain sa mémoire, et lui fit reporter les yeux sur la silhouette qui s’éloignait.

Cette silhouette, cette façon de tourner la tête, ce