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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

— Ce sont les meurtriers de Rolande !

Il n’avait pas une nature à hésiter longtemps…

Il se jeta dans la foule, heurtant, bousculant sur son passage :

— Ah ! je les retrouverai… ou j’y laisserai ma peau !…

Mais il eut beau courir, questionner… Il était trop tard…

Les Flamands avaient poursuivi leur route. Personne ne put le renseigner… Chacun ne pensait qu’à soi… Dans cette cohue, qu’importaient deux malheureux de plus ou de moins…

Il revint au campement… farouche…

À chaque pas, il se demandait :

— Comment cela s’est-il fait ?

Sa bouche était encore emplie d’une acre saveur, étrange et son cœur brouillé.

— Ils m’ont fait respirer un narcotique !

De temps en temps, un sanglot l’étranglait.

— Que dira Simon !… Mon bon Dieu ! moi qui avais tant promis de lui garder ce secret !…

Quand il retrouva le barou, Barbarat n’osa l’interroger, tant il avait vieilli en quelques minutes, les yeux d’un fou, et des sanglots plein les lèvres.

Du champ où ils avaient mené la voiture on apercevait dans le lointain la cathédrale imposante, splendide de force et d’éternité, étendant sur Reims, en tumulte de guerre, l’ombre protectrice de ses hautes tours, ouvragées et dentelées avec l’art prodigieux des divins artistes qui, pendant des siècles, y avaient apporté le patient labeur de leur génie et de leur foi naïve…

Des gens dormaient encore… étendus pêle-mêle… et qui, toute la nuit, avaient ainsi dormi sous l’averse impitoyable et froide…

Ils se plaignaient dans leur sommeil…