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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

Ce fut ainsi que les journées s’écoulèrent.

Et ce fut ainsi, pour elle, que se leva l’aurore du 13 septembre.

Ce jour-là était un samedi.

Il pleuvait.

Les bruits de la bataille se rapprochaient.

Roulements de la canonnade et crépitements de mitrailleuses devenaient plus distincts.

Elle ne s’en inquiéta pas, tournant seulement parfois la tête vers l’ouest et le sud-ouest de la ville, d’où venait la formidable tempête.

Au courant de la journée, des gens qui partageaient sa misère lui dirent :

— Ils s’en vont, ma bonne vieille… Vous ne les voyez donc pas ?

Non, elle ne les voyait pas.

Pourtant, c’était vrai, les Boches évacuaient Reims, en emmenant avec eux une centaine d’otages qu’ils renvoyèrent du reste peu de temps après.

La nuit fut calme.

Toute une troupe de réfugiés, dont Pulchérie faisait partie, avait cherché un abri dans une maison de la rue du Barbâtre.

Aux premières lueurs de l’aube, en sortant, ils entendirent des hommes, éperdus de joie, qui couraient on ne sait où, allaient en avant, revenaient sur leurs pas, et qui criaient en un accès de folie :

— Ils sont partis… Les Français arrivent !

Et c’était vrai.

Par petits groupes, on les vit, sous le soleil levant, qui longeaient les maisons, le fusil à la main, dépoitraillés, pliés sous le sac, en sueur, glorieux et superbes.

En un instant les rues furent envahies.

Des tonneaux de vin s’alignèrent…

Les femmes cueillirent des fleurs…

Elles embrassaient les soldats en pleurant…