Aller au contenu

Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/182

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mêmes à une persécution. Enfin les juifs étaient exclus de la jouissance des droits naturels de l’homme. On serait en droit de dire que l’Assembléo nationale ne connaissait pas la liberté de conscience. Les mêmes hommes qui ont presque renversé une monarchie séculaire, qui, dès les premiers jours de leur réunion, ont anéanti la féodalité, qui, dans la Déclaration des droits de l’homme, ont donné le Code de la liberté et de la raison, ces sages, ces modérés, ces ennemis des préjugés et de la routine, mettent, sans hésiter, les juifs en dehors du droit. Pendant qu’ils refusent ainsi solennellement de consacrer le principe absolu de la liberté religieuse, quel philosophe ne revoit par la pensée ces champs de batailles où l’on s’égorgeait pour une idée, ces cirques romains où des légions venaient mourir pour la foi, ces bûchers, ces chevalets, tous ces instruments de torture, ces galères, où l’honneur, la probité, la conscience, étaient enchaînés, par ordre du roi, avec le rebut et l’horreur de l’espèce humaine ? Hélas ! l’évidence ne s’était pas faite encore après tant de siècles, après tant de larmes, tant de sang répandu, tant de nobles cœurs comprimés, tant d’hommes de génie morts à la peine, dans les cachots, dans l’exil, sur les bûchers ! Ce n’est qu’à la veille de se dissoudre, le 28 septembre 1791, que l’Assemblée prononça le décret suivant. J’en cite les termes, non sans tristesse. Ce décret des derniers jours semble arraché à l’Assemblée constituante. Duport, en le proposant, rappela que les musulmans jouissaient des droits politiques en France. Voici le décret ; je le rapproche à dessein de la constitution civile du clergé, parce que ces deux actes, si différents en apparence, procèdent du même principe :

« L’Assemblée nationale, considérant que les conditions nécessaires pour être citoyen français et pour devenir citoyen actif sont fixées par la Constitution, et que tout homme qui, réunissant lesdites conditions, prête le serment civique et s’engage à remplir tous les devoirs que