Aller au contenu

Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/197

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sacré au culte religieux par une société particulière. Paix et liberté. » C’était se soumettre à la loi, invoquer les principes mêmes de la Révolution : une émeute fit avorter le projet, rendit le culte impossible. Il en fut de même, rue des Carmes, au collège des Irlandais. Le roi, qui avait sanctionné la Constitution civile, en restant personnellement fidèle à la communion romaine, voulut se rendre à Saint-Cloud pour faire ses pâques : une émeute l’en empêcha. La Fayette réclama énergiquement au nom des principes violés. Il ouvrit une chapelle privée dans sa maison. La question fut portée devant l’Assemblée, qui, après de longs débats, reconnut que les prêtres orthodoxes avaient seulement perdu la qualité de fonctionnaires publics, et le droit de célébrer le culte aux frais de l’État, dans les édifices appartenant à l’État ; mais qu’ils demeuraient libres d’exercer leur religion, comme ils l’entendaient, dans des chapelles privées. La majorité de l’Assemblée le voulait ainsi ; mais la majorité de Paris pensait autrement. Ceux mêmes qui n’étaient pas poussés par le désir d’en finir avec la religion, prenaient au sérieux la nouvelle Église d’État. Ils la soutenaient, et ils attaquaient la liberté des cultes, par libéralisme, parce qu’ils n’apercevaient pas clairement le principe abstrait de la liberté, tandis qu’ils connaissaient parfaitement le passé du catholicisme et les opinions politiques de la plupart des prêtres réfractaires. Il faut aimer beaucoup la liberté pour l’aimer dans ses ennemis. La translation des cendres de Voltaire au Panthéon, et peu de temps après, la fuite du roi à Varennes augmentèrent les alarmes des révolutionnaires, dont les soupçons se portaient à chaque occasion sur les émigrés et sur les prêtres. Dans la séance du 4 août, un député nommé Legrand, proposa d’exiler, à trente lieues de leur domicile, les prêtres insermentés du Nord et du Pas-de-Calais. La venue de l’Assemblée législative n’améliora pas leur condition ; au contraire, la haine montait, et des imprudences lui fournissaient chaque jour des prétextes. On