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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/274

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berté ne serait qu’une tolérance. La révolution avait été faite contre la royauté, l’aristocratie et le clergé ; le clergé revenait vainqueur et moins disposé aux concessions que le roi et la noblesse. En général, le clergé catholique fait peu de concessions, parce qu’il les regarde comme nuisibles à ceux-là mêmes qui les obtiennent. On vit bientôt ce que seraient cette égale liberté et cette même protection promises par l’article 5. Dès le 7 juin 1814, le préfet de police, M. Beugnot, rendait une ordonnance qui proscrivait toute espèce de travail et de commerce le dimanche « pour attester, disait-il, le retour des Français à l’ancien respect de la religion et des mœurs, et à la pratique des vertus. » Et cette ordonnance fut convertie en loi de l’État le 18 novembre 1814[1]. Mais ce n’était ni un simple préfet de police, ni les ministres, ni le roi, qui devaient donner l’élan à la réaction cléricale.

Il existait, depuis le commencement de la République, une association, soigneusement cachée d’abord pour échapper à la proscription, et qui n’avait eu pour but, sous la Convention, que de se livrer en commun aux exercices du culte catholique. Un ancien jésuite, le P. Delpuits, attaché autrefois à la maison de Doudeauville, en était l’âme. Les affiliés se créèrent, avec beaucoup de mystère et d’habileté, d’utiles relations pour échapper au danger d’abord, et ensuite pour se rendre les uns aux autres des services d’une autre nature. On se réunissait chez Mlle de Sarons, dans un salon qui avait fait partie du séminaire des missions étrangères, et après la mort de Mlle de Sarons, chez Mlle de Polignac, qu’elle institua pour sa légataire.

  1. Elle est encore appliquée aujourd’hui, et elle l’a été notamment le 6 janvier 1866 par le tribunal de simple police de Sainte-Foy (Gironde). Sur appel, la Cour de cassation, suivant la jurisprudence de ses arrêts antérieurs (22 novembre 1838, — 6 décembre 1845, — 21 décembre 1850, — 6 décembre 1851, — 16 février et 2 juin 1854, — 28 juillet 1855, — 4 et 10 juin 1857, — 28 juillet 1864), a confirmé purement et simplement. (Arrêt du 20 avril 1866. Plaidoirie de M. Monod, avocat à la Cour de cassation.)