Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/308

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Angleterre les deux célèbres universités d’Oxford et de Cambridge, et en Irlande même, celle de Dublin, tandis que les catholiques n’avaient que l’obscure université de Stonyhurst, dans le comté de Lancastre[1] ? L’Irlande n’avait même pas un séminaire, et le clergé romain y était réduit à envoyer ses jeunes lévites en France et en Belgique pour terminer leur éducation. On crut obéir à un devoir strict et donner au bill d’émancipation son développement normal, en accordant au collège de Saint-Patrick, fondé à Maynooth en 1795 par le parlement irlandais pour le recrutement du clergé catholique, et qui, depuis ce temps, recevait annuellement une subvention de 8 à 9 000 livres, une dotation perpétuelle de 26 360 livres. Cette allocation considérable, qui faisait du collège de Maynooth une institution publique, fut votée en 1845. On apprendra sans étonnement qu’elle ne fut pas bien accueillie par tous les catholiques. Les puritains du parti affectèrent de la regarder comme une sorte de pacte entre l’Église romaine et l’Église établie ; ils virent avec douleur les archevêques d’Armagh, de Dublin, de Cashel et de Tuam, accepter avec d’autres membres du clergé romain le titre et les fonctions d’administrateurs. Pour recevoir de bonne grâce la riche dotation qu’on leur offrait, ils auraient voulu qu’on leur donnât en même temps la liberté tout entière ; et c’est ce que l’État ne donne jamais, en aucun pays, quand il paye. D’un autre côté, les protestants zélés regardaient cette adoption par l’État d’une institution éminemment catholique comme une véritable apostasie. Ils n’avaient supporté qu’en frémissant le bill d’émancipation qui ouvrait aux catholiques les carrières militaires et civiles ; mais enfin ce bill d’émancipation ne faisait autre chose que lever l’interdiction

  1. Aujourd’hui les catholiques peuvent suivre les cours et prendre le gracie de bachelier ès arts dans toutes les universités anglaises (maître ès arts à Cambridge). Mais ils ne peuvent être ni maître ès arts, ni professeur, ni fellow à Oxford.