Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/374

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il me semble, je l’avoue, que quand ce refus n’est pas arbitraire, quand il est fondé sur des faits incontestables et d’une importance grave, les familles devraient le supporter sans se plaindre. Un homme abandonne notoirement la religion dans laquelle il a été élevé ; même au moment de la mort, il ne se réconcilie pas avec elle. À peine est-il cloué dans son cercueil, que la famille appelle les prêtres. Que veut-elle ? La plupart du temps elle cède à une routine, elle est poussée par l’usage, non par la foi. Si le prêtre refuse à ce mort une bénédiction que, vivant, il eût repoussée, n’est-il pas dans son droit ? S’il exerce ce droit avec modération, et s’il n’insulte pas ce cercueil et cette douleur, qui peut lui reprocher sa fermeté ? C’est peut-être un acte de droiture de ne pas vouloir tourner en comédie et en grimace les bénédictions de la mort. Ces occasions

    cependant si, se sentant atteints du coup mortel, ils réclamaient un prêtre ou les secours de la religion, et que ce fait fût attesté par plusieurs témoins, nous pensons qu’on peut tempérer la rigueur des canons ; 7o aux pécheurs publics et notoires qui meurent dans l’impénitence ; tels sont, par exemple, ceux qui vivent publiquement dans l’adultère ou le concubinage : mais il faut que l’impénitence soit certaine et tellement publique, tellement scandaleuse, que ce serait un nouveau scandale de leur rendre les honneurs réservés à ceux qui meurent chrétiennement. Dans le doute si on doit ou non les refuser dans tel ou tel cas particulier, si on ne peut recourir à l’évêque, il faut se déclarer pour la sépulture : Odia sunt restringenda ; 8o à ceux qui sont morts dans l’acte du crime, s’ils n’ont pas eu le temps de témoigner du repentir ; mais il faut que le crime soit public et bien avéré : tel serait le cas d’un assassin qui serait tué par la personne qui se défendrait ; 9o à ceux qui, passant publiquement pour ne s’être pas confessés dans l’année et n’avoir pas reçu le sacrement de l’Eucharistie à Pâques, sont morts sans donner aucun signe de contrition. Mais comme aujourd’hui il y a malheureusement un trop grand nombre de personnes qui ne remplissent ni le devoir de la confession annuelle, ni celui de la communion pascale, on est obligé de modifier ce règlement, en restreignant le refus de la sépulture ecclésiastique à celles d’entre elles qui, par impiété, auraient refusé publiquement les sacrements à l’article de la mort… Si le prêtre parle au malade des sacrements, en particulier, et qu’il passe dans l’opinion publique pour avoir reçu les sacrements, quoiqu’il n’en ait rien fait, on lui donnera la sépulture ecclésiastique. » Le card. Gousset, Théol. mor., t. II, p. 43, sqq.