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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/389

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tout entière n’était qu’une vaste école de dépravation, et, suivant l’expression consacrée, la sentine de tous les vices. Il est bon de remarquer que presque toute la polémique roula sur les livres de M. Cousin ; que les autres ne figurèrent au procès qu’en qualité de comparses, et pour faire nombre ; de sorte qu’en définitive, on accomplit sous nos yeux ce tour de force vraiment unique de démontrer que l’Université pervertissait les mœurs et l’esprit de la jeunesse, parce que les livres de M. Cousin, qui n’étaient pas même des livres de classe, contenaient au plus deux ou trois phrases, interprétées par ses ennemis dans un sens panthéiste. Ainsi l’Université était corrompue, parce qu’elle avait à sa tête, à côté de M. Villemain, de M. Guizot, et de tant d’autres hommes graves et illustres, un philosophe qui a pu résumer sa doctrine dans un livre de morale, et qui a eu le droit d’appeler ce livre Le vrai, le beau et le bien.

Si cette conspiration a réussi un moment, grâce à la puissance de la presse, il est certain que les chefs du parti n’ont pas pu croire à ces exagérations et à ces calomnies. Une preuve, entre mille autres, que l’éducation des collèges était religieuse, c’est que les véritables écoles panthéistes et matérialistes combattaient avec le clergé contre l’Université. L’Université était accusée d’impiété par les uns, et d’hypocrisie par les autres. Elle n’était au fond que respectueuse et circonspecte ; mais tellement respectueuse, circonspecte à tel point, que le clergé, selon moi, au lieu de tant d’attaques et de tant d’injures, lui devait des actions de grâce.

Cependant, à regarder non plus les collèges, mais la société, il était évident que le nombre des fidèles diminuait de jour en jour. L’incrédulité faisait des progrès, et, disons-le sur-le-champ, elle continue à en faire. Nous verrons tout à l’heure si c’est l’éducation laïque qui en est cause ; mais ne craignons pas de constater d’abord le fait.

Si l’on compare la situation de la France, par rapport à la