Page:Jules Vallès - L'Enfant.djvu/176

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Je suis tombé sur une mère qui a du bon sens, de la méthode.


Je ne trouverai donc personne qui veuille s’enfuir avec moi !

Ricard ?

Ils sont neuf enfants.

On les fouette à outrance. — Quel bonheur !

Je tâte Ricard ; — quand je dis je tâte, je parle au figuré : il me défend de le tâter (il a trop mal aux côtes) — il est sale comme un peigne ; il m’explique que c’est parce qu’ils sont sales que leur mère les bat ; mais elle est diablement sale aussi ; elle !

Elle les rosse encore parce qu’ils disent des gros mots ; ils jurent comme des charretiers ; il y a le petit de cinq ans qui crie toujours : « Crotte pour toi ! »

Il n’y en a qu’un dans la famille qui est bien sage et qui ne jure pas. C’est celui qui est en classe avec moi.

On le bat tout de même. Pourquoi donc ?

Parce qu’il ne faut pas faire de préférences dans les familles, c’est toujours d’un mauvais effet. Les autres pourraient s’en plaindre.

Puis, « il est là comme une oie. »

Il est là comme une oie. — Voilà pourquoi on le bat.

On fouette les autres parce qu’ils font du bruit et qu’ils jurent et sont grossiers : on le fouette, lui, parce qu’il ne dit rien et se tient tranquille.

« Il est là comme une oie… »