Page:Jules Vallès - L'Enfant.djvu/190

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Je ne détestais pas qu’on m’appelât bandit, gredin ; j’y étais fait, — même cela me flattait un peu.

Bandit ! — comme dans le roman à gravures. — Puis je sentais bien que cela faisait plaisir à ma mère de me faire du mal ; qu’elle avait besoin de mouvement et pouvait se payer de la gymnastique sans aller au gymnase, où il aurait fallu qu’elle mît un petit pantalon et une petite blouse. — Je ne la voyais pas bien en petite blouse et en petit pantalon.

Avec moi, elle tirait au mur ; elle faisait envoler le pigeon, elle gagnait le lapin, elle amenait le grenadier.


Je vis donc depuis quelque temps, sans rien qui me rafraîchisse ou me réchauffe, comme la gerbe qui moisit dans un coin, au lieu de palpiter sous le fléau, comme l’oie qui, clouée par les pattes, gonfle devant le feu.

Je n’ai plus à me lever pour aller — cible résignée — vers ma mère ; je puis rester assis tout le temps !

Ce chômage m’inquiète.

Rester assis, c’est bien, — mais quand on retournera aux habitudes passées, quand l’heure du fouet sonnera de nouveau, où en serai-je ? Les délices de Capoue m’auront perdu : je n’aurai plus la cuirasse de l’habitude, le caleçon de l’exercice, le grain du cuir battu !


Que se passe-t-il donc ?

Je ne comprends guère, mais il me semble que ma- -