Page:Jules Vallès - L'Enfant.djvu/206

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— Non, rien, ce serait lui faire du tort pour toute sa vie dans l’Université, et puis, vous savez, j’aurais été à sa place, avec une femme comme celle qu’il a…

— Il est de fait ! et toujours à vous parler des cochons qu’elle a gardés, des bourrées qu’elle a dansées. — Youp, la, la ! — tandis que madame Brignolin, eh ! eh !

— Plus bas, dit le proviseur, si ma femme entendait ! »

J’eus peur dans mon cabinet. Je me les figurais allant à la porte, l’entr’ouvrant pour voir s’il y avait des oreilles.

C’était le proviseur et l’inspecteur d’académie ; j’avais reconnu leur voix. Ils reprirent :

« Je me suis contenté de lui donner un avertissement une fois. J’ai pris le prétexte de son fils.

— Qu’est-ce que c’est que ce garçon-là ?

— Un pauvre petit malheureux qu’on habille comme un singe, qu’on bat comme un tapis, pas bête, bon cœur. Il a plu beaucoup à l’inspecteur, la dernière fois… Je l’ai donc pris pour prétexte. « Occupez-vous plus de votre fils » ; cela voulait dire : « Restez un peu plus avec votre femme, » — et il a tenu compte de l’observation. »


Je restai rêveur toute la journée du lendemain…

Mon père s’en fâcha, et me bousculant avec un geste de colère :

« Vas-tu retomber dans tes rêvasseries, fainéant ?