fromages bleus à vendre. La bête va l’amble ta ta ta, ta ta ta ! toute raide ; on dirait que son cou va se casser, et sa crinière couleur de mousse roule sur ses gros yeux qui ressemblent à des cœurs de moutons.
La tante ou la cousine montent dessus comme des hommes ; les mollets de ma tante sont maigres comme des fuseaux noirs, ceux de ma cousine paraissent gras et doux dans les bas de laine blanche.
Hue donc ! Ho, ho !
C’est Jean qui tire et fait virer le cheval ; il a eu son picotin d’avoine et il hennit en retroussant ses lèvres et montrant ses dents jaunes.
Le voilà sellé.
« Passez-moi Jacquinou, » dit la Polonie, qui est parvenue à abaisser sur ses genoux sa jupe de futaine et s’est installée à pleine chair sur le cuir luisant de la selle. Elle m’aide à m’asseoir sur la croupe.
J’y suis !
Mais on s’aperçoit que j’ai oublié mes habits roulés dans un torchon, sur la table d’auberge pleine de ronds de vin cernés par les mouches.
On les apporte.
« Jean, attachez-les. Mon petit Jacquinou, passe tes bras autour de ma taille, serre-moi bien. »
Le pauvre cheval a le tricotement sec et les os durs ; mais je m’aperçois à ce moment que ce que dit la fable qu’on nous fait réciter est vrai.
Dieu fait bien ce qu’il fait !
Ma mère en me fouettant m’a durci et tanné la peau.
« Serre, je te dis ! Serre-moi plus fort ! »