Page:Jules Vallès - L'Enfant.djvu/324

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au café ou au bain et qu’il aperçoit des bancs vides, il dit :

« Je vois ici beaucoup d’élèves qui n’y sont pas. »

Le professeur de français s’appelle N… c’est le frère d’un académicien qui a deux morales au lieu d’une : abondance de bien ne nuit pas.

Il est long, maigre et rouge, a une redingote à la prêtre, des lunettes de carnaval, une voix cassée, flûtée, sifflante. De cette voix-là il lit des tirades d’Iphigénie ou d’Esther, et quand c’est fini, il joint les mains, regarde le plafond plein d’araignées, et crie : « À genoux ! à genoux ! devant le divin Racine ! »

Il y a un nouveau qui, une fois, s’est mis à genoux pour tout de bon.

Et d’un geste de dédain, chassant le bouquin qu’il a devant lui, le professeur continue :

« Il ne reste plus qu’à fermer les autres livres. »

Je ne demande pas mieux.

« Et à s’avouer impuissant. »

C’est son affaire.


J’ai commencé par avoir de bonnes places en discours français, mais je dégringole vite.

De second, je tombe à dixième, à quinzième !


Ayant à parler de paysans qui, pour fêter leur roi, trinquent ensemble, j’avais dit une fois :

Et tous réunis, ils burent un bon verre de vin.

« Un bon ! — Ce garçon-là n’a rien de fleuri, rien, rien ; je ne serais pas étonné qu’il fût méchant. Un bon ! Quand notre langue est si fertile en tours heu- -