Page:Jules Vallès - L'Enfant.djvu/367

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On me regarde un peu quand je reparais dans la cour des classes. On m’entoure, et l’on me dévisage. Un garçon qui revient de Paris…, jugez !…


Le professeur est un jeune homme qui, sorti le premier de l’École normale, a été reçu à l’agrégation le premier ; qui arrive toujours le premier au cours, et qui se présente toujours le premier à l’économat pour toucher ses appointements. Il loge au premier, dans une maison au fond d’une rue lugubre. Au théâtre, il va aux premières, et au premier rang.

C’est sa mère qui a fait cette combinaison.

« Je veux que tu sois partout, partout, le premier. »


Ce professeur me traite assez bien. Il compte sur moi pour faire le péripatéticien chez lui, dans son jardin.

Il avait du monde autrefois, à qui il faisait tirer de l’eau pour arroser son potager ; il n’a plus personne.

Il pense que moi, fils de collègue — qui suis d’Éleusis aussi, — j’ai l’étoffe d’un disciple et d’un tireur d’eau.


Je ne sais comment il a été nommé à ce poste-là.

Je trouvais mes professeurs de rhétorique ennuyeux à Paris, mais l’on m’assurait qu’il y avait parmi les professeurs de philosophie des gens qui raisonnaient, qui pensaient, qui avaient la tête pleine.

Une fois même, il y en avait un qui était venu ser- -