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singulier.
cas sujet. cas régime.
Li chevals (caballus). Le cheval (caballum).
pluriel.
Li cheval (caballi). Les chevals (caballos).

Le français aurait gardé les deux régimes et le wallon, d’après Bailleux, le cas régime au singulier et le cas sujet au pluriel.

Cette dernière supposition de Bailleux n’est, d’après son auteur lui-même, qu’une hypothèse.

Il est excessivement peu probable que le wallon ait fait le chassé-croisé dont on l’accuse. Il semble plutôt qu’il ait confondu tous les cas, les exemples d’une telle confusion ne manquant certes pas dans les dialectes populaires.

Revenons au premier argument de Bailleux. L’usage, dit cet auteur, s’oppose à l’emploi de l’s du pluriel : 1o dans les pièces anciennes ; 2o dans les pièces modernes ; 3o dans la prononciation.

1o Pièces anciennes. Faisons d’abord observer que ces pièces ne sont ni suffisamment nombreuses, ni suffisamment caractérisées quant à leurs auteurs, ni suffisamment anciennes (la plus vieille pièce en dialecte wallon proprement dit ne datant que de 1620), pour permettre d’en tirer des conclusions sérieuses quant à l’orthographe. En outre, ce sont là des sources très sujettes à caution, les manuscrits ayant été recopiés on ne sait par qui, ni comment.

Leur orthographe est d’ailleurs très phonétique, en ce sens qu’elle supprime une foule de lettres qui ne se prononcent pas. Tel a très vraisemblablement été le cas pour l’s du pluriel.

Enfin, raison principale, et malgré ce qu’en dit Bailleux, l’s du pluriel existe bel et bien dans les pièces qu’il signale et dans d’autres, spécialement dans la Pasquêye critique et calotène, dans celle de Qwarème et Chârnêye, dans celle des Aiwes di Tongues, dans la Complainte de 1623, dans la Chanson contre les prédicans (1650), etc.

Dans ces pièces, l’emploi ou le rejet de l’s paraît dépendre de la fantaisie du scribe.

2o Pièces nouvelles. Les auteurs de l’époque de Bailleux écrivaient le wallon comme ils le trouvaient bon, d’après des systèmes personnels et variables ; et, parmi ces auteurs, il s’en trouvait employant l’s du pluriel, comme Bailleux lui-même avant la publication de sa note.