Page:Kahn - Symbolistes et Décadents, 1902.djvu/292

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classicisme de Casimir Delavigne, qui, par le choix de ses sujets et leur maniement, se rattacherait plus qu’il ne le croyait à la tragédie de Voltaire, a avorté. C’est le grand temps de l’influence d’Hugo. Les meilleurs se rangent près de lui, dont Sainte-Beuve, qui, d’après quelques indications anglaises, crée une poésie personnelle, pédestre, intime, et explique le romantisme par sa critique. Théophile Gautier, critique et prosateur, romancier et nouvelliste, s’affirme aussi comme poète, quoique sa rhétorique artiste ait donné surtout sa mesure plus tard dans les Émaux et Camées. Gérard de Nerval, plus instruit qu’aucun des romantiques, laisse quelques sonnets montrant quel poète en vers il eût pu être. Avec lui perce la première lassitude visible de l’instrument romantique du vers, adouci par Lamartine, fortifié par Hugo, stylisé par Vigny, enrichi par Gautier. Une jolie voix de femme se fait entendre à l’écart du cénacle, celle de Mme Desbordes-Valmore. Le théâtre d’Hugo continue à s’affirmer ; les Contemplations et la première Légende des Siècles donnent le maximum de ce qu’a pu le romantisme, et voici avec Baudelaire quelque chose de nouveau qui se lève. À ce moment, il y a contre la nouvelle école une réaction provoquée par l’anormal et l’excès de pittoresque facile de certains romantiques ; c’est Ponsard qui la formule par un retour inutile à l’art racinien, avec des essais malencontreux de drame moderne dans la forme classique, un retour agressif de la comédie en cinq actes et en vers. Casimir Delavigne, Casimir Bonjour, Francis Ponsard, Émile Augier, chaînons qui aboutissent à M. de Bornier et Parodi, de nos jours.