Page:Kahn - Symbolistes et Décadents, 1902.djvu/389

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Ni Champfleury, ni Duranty, les chefs, après lui, du roman d’observation, ne portent là leur attention. Flaubert en son génie synthétique s’aperçut de ce mouvement. Flaubert n’était pas homme à traverser la tourmente de 1848 sans nous en garder une notation ; et du temps que Théophile Gautier passa à tourner ces admirables ronds de serviettes poétiques que sont les Émaux et Camées, Flaubert garda les pages qui devinrent l’Éducation sentimentale. Mais Flaubert, peu sociologue (le mot lui eût déplu), vit la Révolution de 1848 à la façon d’un Daumier. D’un œil aussi exercé que le génial caricaturiste, d’un outil au moins aussi acéré, il nous sertit tous les fantoches bêtes ou cruels, versatiles, cupides, ambitieux, qui furent les caméléons de cette époque, et il nous laissa une fresque admirablement brossée des terreurs de la bourgeoisie et de la férocité de la répression durant les émeutes, de la chute du Roi au rétablissement de l’Empire.

Du côté du roman idéaliste, il y eut plus de clairvoyance. George Sand, ce grand lac tranquille où se mirèrent tant de reflets, traduisit les idées de Pierre Leroux ; l’intention du roman social et du roman socialiste exista chez elle, après qu’elle eut terminé sa série de romans féministes. Hugo avait, dans les Misérables, des pages d’histoire, à la vérité, par le mode de présentation et la largeur voulue de la phrase, un peu visionnaires.

Mais c’est dans Zola que pour la première fois le roman social, inconnu à Goncourt, fermé à Daudet, prend de l’ampleur. Roman politique encore quand il dit la résistance des insurgés de province au coup