Page:Kann - Journal d'un correspondant de guerre en Extrême-Orient.djvu/40

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Des sociétés secrètes russophobes se constituèrent, les jours des ministres temporisateurs n’étaient plus en sûreté. Les autorités durent se borner à retarder la rupture avec la Russie, pour avoir le temps d’achever leurs préparatifs militaires et maritimes.

Aujourd’hui le sort en est jeté, la nation est satisfaite, la lutte est ouverte. Mais cette guerre qu’il a tant désirée, le Japon se rend compte du danger qu’elle entraîne. Il sait que c’est un duel à mort dont il sortira vainqueur ou brisé. Le peuple tout entier a conscience de la force de son adversaire. Il n’a plus la gaieté insouciante qu’on remarquait pendant la guerre de Chine, car son patriotisme n’est pas de ceux qui s’évanouissent en chansons, en manifestations et en forfanterie. Il est sobre, calme et silencieux ; il a quelque chose d’obstiné, qui montre que la volonté de toute la nation se concentre sur un but unique : c’est celui qui provoque les grands sacrifices et produit les héros.

Tous les hommes voudraient combattre ; on voit les vieillards et les enfants se lamenter de ne pouvoir suivre les soldats à l’armée. Un ancien cavalier, nommé Kato, qui s’était présenté, sans succès, comme volontaire, vient de se suicider. Des jeunes gens, qui ne peuvent encore être enrôlés et désirent au moins voir leurs camarades à l’œuvre, se sont offerts connue boys aux correspondants de jour-