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DES PRINCIPES DE LA RAISON PURE PRATIQUE.


mène *[1], en montrant que, dans toutes ses applications à des objets des sens, il a pour siège l’entendement pur, et que, si, rapporté à des choses en soi (qui ne peuvent être des objets d’expérience), il ne peut recevoir aucune détermination et représenter aucun objet déterminé au point de vue de la connaissance théorique, il se pourrait pourtant qu’il trouvât à quelque autre point de vue (peut-être au point de vue pratique) une application déterminée. Ce qui ne pourrait être si, comme le veut Hume, le concept de la causalité contenait quelque chose qu’il fut absolument impossible de concevoir.

Or, pour découvrir cette condition de l’application du concept de la causalité à des noumènes, il suffit de se rappeler pourquoi nous ne sommes pas satisfaits de l’application de ce concept aux objets de l’expérience, et pourquoi nous voulons l’appliquer aussi à des choses en soi. On verra aussitôt que ce n’est pas dans un but théorique, mais dans un but pratique que nous nous imposons cette nécessité. Dans la spéculation, quand même une chose nous réussirait, nous n’aurions véritablement rien à gagner du côté de la connaissance de la nature, et en général relativement aux objets qui peuvent nous être donnés ; mais nous passerions du monde sensible **[2] (où nous avons déjà assez de peine à nous maintenir et assez à faire pour parcourir soigneusement la chaîne des causes) au monde supra-sensible, afin d’achever et de limiter notre con-

  1. * J’ai ajouté, pour plus de clarté, ces mots comme noumènes, qui ne sont pas dans le texte. J. B.
  2. ** vom Sinnlich bedingten.