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DE LA MÉTAPHYSIQUE DES MŒURS


même temps objective, et dont, par conséquent, la valeur est universelle, et les ordres sont des lois auxquelles on doit l’obéissance, c’est-à-dire qu’il faut suivre, même contre son inclination, le mot conseil emporte aussi l’idée de nécessité, mais d’une nécessité subordonnée à une condition subjective et contingente, c’est-à-dire, à cette condition que tel ou tel homme place son bonheur en telle ou telle chose. L’impératif catégorique, au contraire, n’étant subordonné à aucune condition, étant absolument quoique pratiquement nécessaire, peut être justement appelé un ordre. On pourrait encore appeler les impératifs de la première espèce, techniques se rapportant à l’art ; ceux de la seconde, pragmatique 1[1] (se rapportant à la prospérité) ; ceux de fa troisième enfin, moraux (se rapportant à la liberté de la conduite en général, c’est-à-dire aux mœurs).

Maintenant la question est de savoir comment sont possibles tous ces impératifs. On ne demande point par la comment on peut concevoir l’accomplissement de l’action qu’ordonne l’impératif, mais seulement la contrainte de la volonté qu’il exprime. Il n’est besoin d’aucune explication particulière pour montrer comment est possible un impératif de l’habileté. Qui veut

  1. 1 Il me semble que le sens propre du mot pragmatique peut être fort exactement déterminé. En effet on donne l’épithète de pragmatiques aux sanctions qui ne dérivent pas proprement du droit des États, comme lois nécessaires, mais des précautions destinées à assurer la prospérité générale. Une histoire a un caractère pragmatique, quand elle enseigne la prudence, c’est-à-dire, quand elle apprend aux nouvelles générations à soigner leurs intérêts mieux, ou du moins aussi bien, que les générations passées.