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FONDEMENTS


seulement sur le rapport des êtres raisonnables entre eux, en tant que la volonté de chacun d’eux doit être considérée comme législatrice, ce qui seul permet de les considérer comme des fins en soi. La raison étend donc toutes les maximes de la volonté, considérée comme législatrice universelle, à toutes les autres volontés, ainsi qu’à toutes les actions envers soi-même, et elle ne se fonde pas pour cela sur quelque motif pratique étranger ou sur l’espoir de quelque avantage, mais seulement sur l’idée de la dignité d’un être raisonnable, qui n’obéit à d’autre loi qu’à celle qu’il se donne lui-même.

Dans le règne des fins tout a ou un prix[1], ou une dignité[2]. Ce qui n’a que du prix peut être remplacé par quelque équivalent ; mais ce qui est au-dessus de tout prix et ce qui, par conséquent, n’a pas d’équivalent, voilà ce qui a de la dignité.

Ce qui se rapporte aux penchants et aux besoins généraux de l’homme a un prix vénal[3] ; ce qui, même sans supposer un besoin, est conforme à un certain goût, c’est-à-dire à cette satisfaction qui s’attache au jeu tout à fait libre des facultés de notre esprit[4], a un prix d’affection ; mais ce qui constitue la condition

  1. Preis.
  2. Würde.
  3. Je traduis littéralement Marktpreis, prix de marché, mais je conviens que cette expression est un peu bizarre, comme celle qui vient ensuite : Affectionpreis, prix d’affection. J. B.
  4. Wohlgefallen am blossen zwecklonen Spirl unserer Geinüthsträfte. Pour bien comprendre ce passage il faut connaître la théorie de Kant sur le goût, le beau, le sublime et les beaux-arts. Voyez la Critique du Jugement. Trad. fr tome ler J. B.