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LA MORALE DE KANT


obéit à la loi par respect pour la loi, c’est-à-dire à l’impératif catégorique.

Celle volonté sera d’autant plus pure qu’elle sera plus complètement affranchie de tous les mobiles de la nature sensible, non seulement des inclinations égoïstes, mais même des inclinations altruistes bienveillantes et charitables. La volonté d’aider les malheureux par sympathie et par pitié n’est pas immorale sans doute, mais elle n’a pas de valeur morale parce qu’elle est subordonnée aux lins de la nature. Supposez au contraire que l’adversité ait détruit en moi tout penchant sympathique et que je porte secours aux malheureux pour celle seule raison que mon devoir est de les aider, ma volonté, dès lors affranchie de la nature sensible, aura un caractère moral. En somme la vertu est à ce prix : émanciper la volonté de toute influence affective naturelle et la mettre sous l’autorité d’une loi qui n’ait rien de commun avec les lois de hi nature.

Mais celle loi, demandera le lecteur de la Critique de la liaison pure, comment |>eut-el ! e m’apparailre puisque notre connaissance est limitée au monde des phénomènes ? Comment puis-je concevoir pour ma volonté une loi différente des lois de ma nature psychologique, une loi qui tombe pour ainsi dire du ciel et qui ne ressemble en rien à celles de ce monde ? il nous faul, pour répondre à celte question, revenir à la Critique de la liaison pure et nous elTorcer de préciser l’idée du rôde que joue la raison, faculté des Idées, dans l’interprétation de la nature. L’entendement, avons-nous dit, se borne à relier les phénomènes entre eux par des règles, par exemple a est la cause de b et b est la cause de c. Lu raison, elle, s’efforce d’embrasser dans son ensemble là tolalilé des phénomènes et d’en faire un système limité et un. Ainsi c’csl pour ramener les phénomènes de la nature à un lel système, qu’elle s’efforce de concevoir un commencement absolu de la série des phénomènes et l’aclion d’une cause libre déterminant l’apparition du premier phénomène. C’est |Kjur systématiser notre vie intérieure qu’elle forme l’idée d’un moi simple et incorruptible. C’est enfin pour unifier l’univers dans son ensemble qu’elle s’élève au concept d’un Être nécessaire et parfait, d’un llieu créateur et souverain du monde. En « ’efforçant d’établir nu moyen de ses idées l’unité des choses, la raison obéit ft une sorte d’obligation logique ; il