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CULTURE DE LA MÉMOIRE.


tout de travers, ils ne savent pas ce qu’ils lisent, etc.

Il faut cultiver la mémoire de bonne heure, mais en ayant soin de cultiver en même temps l’intelligence.

On cultivera la mémoire : 1° En lui donnant à retenir les noms qui entrent dans les récits ; 2° par la lecture et l’écriture ; il faut exercer les enfants à lire de tête et sans avoir recours à l’épellation ; 3° par les langues, que les enfants doivent apprendre en les entendant, avant d’en venir à en lire quelque chose. Ce que l’on appelle un orbis pictus, quand il est convenablement fait, rend alors les plus grands services, et l’on peut commencer par la botanique, par la minéralogie et par la physique générale. Pour en retracer les objets, il faut apprendre à dessiner et à modeler, et pour cela on a besoin des mathématiques. Les premières connaissances scientifiques doivent avoir surtout pour objet la géographie, aussi bien mathématique que physique. Les récits de voyages,

expliqués par des planches et des cartes, conduiront ensuite à la géographie politique. De l’état actuel de la surface de la terre on remontera à son état primitif, et l’on arrivera à la géographie et à l’histoire anciennes, etc.

Mais il faut chercher à unir insensiblement dans l’instruction de l’enfant le savoir et le pouvoir. Entre toutes les sciences les mathématiques paraissent être le seul moyen d’atteindre parfaitement ce but. En outre il faut unir la science et la parole (la facilité d’élocution, l’art de bien dire, l’éloquence). Mais il faut aussi que l’enfant apprenne à distinguer parfaitement la science de la simple opinion et de la croyance. On formera ainsi un esprit juste, et un goût juste aussi, sinon fin ou délicat. Le goût que l’on cultivera sera d’abord