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KANT. — PÉDAGOGIE.


et ensuite la lui attribuer elle-même. On montrera, par exemple, en premier lieu, comment tout est disposé pour la conservation des espèces et leur équilibre, mais de loin aussi pour l’homme, de telle sorte qu’il puisse travailler lui-même à son bonheur.

Le meilleur moyen de rendre d’abord claire l’idée de Dieu, ce serait d’y chercher une analogie dans celle d’un père de famille sous la surveillance duquel nous serions placés ; on arrive ainsi très-heureusement à concevoir l’unité des hommes qu’on se représente comme formant une seule famille.

Qu’est-ce donc que la religion ? La religion est la loi qui réside en nous, en tant qu’elle reçoit son influence sur nous d’un législateur et d’un juge ; c’est la morale appliquée à la connaissance de Dieu. Quand on n’unit pas la religion à la moralité, elle n’est plus qu’une manière de solliciter la faveur céleste. Les cantiques, les prières, la fréquentation des églises, toutes ces choses ne doivent servir qu’à donner à l’homme de nouvelles forces et un nouveau courage pour travailler à son amélioration ; elles ne doivent être que l’expression d’un cœur animé par l’idée du devoir. Ce ne sont que des préparations aux bonnes œuvres, mais non de bonnes œuvres, et l’on ne peut plaire à l’Être suprême qu’en devenant meilleur.

Il faut avec les enfants commencer par la loi qu’ils portent en eux. L’homme est méprisable à ses propres yeux quand il tombe dans le vice. Ce mépris a son principe en lui-même, et non dans cette considération que Dieu a défendu le mal ; car il n’est pas nécessaire que le législateur soit en même temps l’auteur de la loi. C’est ainsi qu’un prince peut défendre le vol dans ses États, sans qu’on puisse le considérer pour cela comme l’au-