Page:Kant-Traité de pédagogie (trad. Barni), 1886.pdf/99

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
92
KANT. — PÉDAGOGIE.


cesse, on leur donnera ainsi une timidité qui ne les quittera plus.

Il ne faut pas, comme on l’a déjà dit plus haut, briser la volonté des enfants, mais seulement la diriger de telle sorte qu’elle sache céder aux obstacles naturels. L’enfant doit d’abord obéir aveuglement. Il n’est pas naturel qu’il commande par ses cris, et que le fort obéisse au faible. On ne doit donc jamais céder aux cris des enfants, même dans leur première jeunesse, et leur laisser ce moyen d’obtenir ce qu’ils veulent. Les parents se trompent ordinairement ici, et croient pouvoir plus tard réparer le mal, en refusant à leurs enfants tout ce qu’ils demandent. Mais il est très-absurde de leur refuser sans raison ce qu’ils attendent de la bonté de leurs parents, uniquement pour leur faire éprouver une résistance et leur faire sentir qu’ils sont les plus faibles.

On gâte les enfants en faisant tout ce qu’ils veulent, et on les élève très-mal en allant toujours au-devant de leurs volontés et de leurs désirs. C’est ce qui arrive ordinairement, tant que les enfants sont un jouet pour leurs parents, surtout dans le temps où ils commencent à parler. Mais cette indulgence leur cause un grand dommage pour toute leur vie. En allant au-devant de leurs volontés, on les empêche sans doute de témoigner leur mauvaise humeur, mais ils n’en deviennent que plus emportés. Ils n’ont pas encore appris à connaître comment ils doivent se conduire. — La règle qu’il faut observer à l’égard des enfants dès leur première jeunesse, c’est donc d’aller à leur secours, lorsqu’ils crient et que l’on croit qu’il leur arrive quelque mal, mais de les laisser crier, quand ils ne le font que par