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DOCTRINE DU DROIT.


nement qu’excite cette faculté qu’a notre raison de déterminer l’arbitre par la seule idée de l’appropriation d’une maxime à l’universalité d’une loi pratique, on apprendra que cette même loi pratique (la loi morale) nous révèle d’abord une propriété de l’arbitre à laquelle nulle raison spéculative n’aurait jamais pu arriver, ni par des principes à priori, ni par quelque expérience, et dont elle ne saurait en aucune manière, si elle y arrivait, démontrer théorétiquement la possibilité ; quand, dis-je, on apprendra que les lois pratiques démontrent invinciblement cette propriété, c’est-à-dire la liberté ; alors on s’étonnera moins de trouver ces lois, à l’exemple des postulats mathématiques, indémontrables[1] et pourtant apodictiques, et de voir en même temps s’ouvrir devant soi tout un champ de connaissances pratiques, absolument fermé à la raison théorétique à l’endroit de cette même idée de la liberté et de toutes ses autres idées de choses supra-sensibles. La conformité d’une action à la loi du devoir est la légalité[2] (legalitas) ; — celle de la maxime de l’action avec cette loi, la moralité[3] (moralitas). La maxime est le principe subjectif d’action que le sujet se donne à lui-même pour règle (la manière dont il veut agir). Au contraire, le principe du devoir est ce que la raison lui ordonne absolument, et par conséquent objectivement (la manière dont il doit agir).

Tel est donc le principe suprême de la doctrine des mœurs[4] : Agis suivant une maxime qui puisse avoir en même temps la valeur d’une loi universelle. — Toute

  1. Unerweislich.
  2. Gesetzmaessigkeit.
  3. Sittlichkeit.
  4. Sittenlehre.