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DE L’INTELLIGENCE

promptement quelque chose en mémoire, se le rappeler facilement, le retenir longtemps, telles sont les qualités formelles de la mémoire. Mais ces qualités vont rarement ensemble. Quand on croit avoir quelque chose dans la mémoire, et qu’on ne peut le faire surgir dans la conscience, on dit alors qu’on ne peut se le rappeler (et non pas qu’on ne peut s’en rappeler, ce qui signifierait qu’on est privé de sens). L’effort fait pour en venir à bout est très fatigant pour l’esprit, et beaucoup mieux vaut se distraire momentanément de cette préoccupation par d’autres pensées, sauf à revenir de temps à autre et sans effort à l’objet ; alors on tombe ordinairement sur une des représentations associées qui rappelle celle qu’on cherche.

Mettre méthodiquement quelque chose en mémoire (memoriœ mandare) s’appelle apprendre (non pas étudier, comme dit le peuple d’un prédicateur qui apprend par cœur tout son prochain sermon). — Cet acte de mémoire peut être mécanique, ou ingénieux, ou judicieux. Le premier ne repose que sur une répétition purement littérale et souvent réitérée : par exemple quand on apprend le livret, et qu’il faut parcourir toute la série des mots les uns après les autres dans l’ordre ordinaire, pour satisfaire à une question, comme lorsqu’on demande à l’élève combien font 3 fois 7, et qu’il est obligé, pour trouver la réponse, de commencer par 3 fois 3 pour arriver à 21 ; ou lorsqu’on lui demande combien font 7 fois 3, et qu’il est obligé de renverser les nombres, et de revenir à 3 fois 7, pour s’y reconnaître. Si la chose apprise est une