Page:Kant - Anthropologie.djvu/190

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attachée à l’incertitude. — Le jugement est plus négatif, plus propre à garantir des erreurs favorisées par la lumière crépusculaire où les objets apparaissent. — La raison tarit les sources de l’erreur (les préjugés), et affermit ainsi l’entendement par l’universalité des principes. — L’érudition agrandit sans doute le champ des connaissances, mais elle n’étend pas les notions et les aperçus sans l’intervention de la raison. Encore faut-il distinguer la raison du raisonnement trop subtil, de l’argutie (Vernünfleln), qui s’exerce en jouant à l’usage de la raison, sans une loi de la raison. S’agit-il de savoir si je dois croire aux revenants ? je puis alors raisonner de toutes les manières sur leur possibilité ; mais la raison défend d’en admettre superstitieusement la possibilité, c’est-à-dire sans un principe propre à expliquer le phénomène d’après des lois naturelles.

La grande différence des esprits dans la manière d’envisager les mêmes objets, les distingue également entre eux. Leurs frottements mutuels, leurs liaisons, leurs séparations produisent naturellement un spectacle d’une variété infinie et bien digne des regards de l’observateur et du penseur. La classe des penseurs peut prendre pour maximes invariables les suivantes, qui ont déjà été données précédemment comme conduisant à la sagesse[1] :

1° Penser par soi-même ;

  1. Comp. plus haut, p. 134, § XLIII.