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Préface
de la seconde édition (1787).


Si, dans le travail que l’on fait sur des connaissances qui sont du domaine propre de la raison, on suit ou non la voie sûre d’une science, c’est ce qu’on peut juger bientôt d’après le résultat. Quand, après avoir fait beaucoup de dispositions et de préparatifs, aussitôt qu’elle arrive au but, elle tombe dans l’embarras, ou que, pour l’atteindre, elle doit, plusieurs fois, retourner en arrière et prendre une autre route ; quand, de même, il n’est pas possible de mettre d’accord les divers collaborateurs sur la manière dont il faut poursuivre le but commun, alors on peut toujours être convaincu qu’une telle étude est encore bien loin d’avoir suivi la marche sûre d’une science et qu’elle est un simple tâtonnement ; et c’est déjà un mérite pour la raison de découvrir, autant qu’elle peut, ce chemin, dût-elle même renoncer, comme à des choses vaincs, à plusieurs vues qui étaient contenues dans le but primitif qu’on s’était proposé sans réflexion.

Que la Logique ait suivi ce chemin déjà depuis les temps les plus anciens, le fait que, depuis Aristote, elle n’a été obligée de faire aucun pas en arrière, suffit à le montrer : je suppose en effet que l’on ne voudra pas lui compter pour des améliorations la mise au rancart de quelques subtilités superflues ou une détermination plus claire de son exposé, choses qui touchent plutôt à l’élégance qu’à la certitude de la science. Ce qu’il faut encore admirer en elle, c’est que, jusqu’à présent, elle n’a pu faire, non plus, aucun pas en avant et que, par conséquent, selon toute apparence, elle semble close et achevée. En effet, si quelques modernes ont cru l’étendre en y ajoutant des chapitres soit de Psychologie, sur les diverses facultés de la connaissance (l’imagination,