Page:Kant - Critique de la raison pure, I.djvu/377

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trouver des trésors, la raison y a creusé bien des trous de taupe qui menacent la solidité de cet édifice. L’usage transcendental de la raison pure, ses principes et ses idées, voilà donc ce que nous sommes obligés de connaître exactement pour pouvoir déterminer l’influence de la raison pure et en apprécier la valeur. Cependant, avant de quitter cette introduction, je supplie ceux qui ont la philosophie à cœur (ce qui dit plus qu’on ne semble le croire ordinairement), je les supplie, s’ils se trouvent convaincus par ce que je viens de dire et par ce qui suit, de prendre sous leur protection l’expression d’idée ramenée à son sens primitif, afin qu’on ne la confonde plus désormais avec les autres expressions dont on a coutume de se servir pour désigner indistinctement les divers modes de représentation, au grand préjudice de la science. Il y a pourtant assez d’expressions parfaitement appropriées aux différentes espèces de représentations, pour que nous n’ayons pas besoin, quand nous voulons exprimer l’une, d’empiéter sur le domaine d’une autre. En voici une échelle graduée. Le terme générique est la représentation[ndt 1] en général (repræsentatio). La représentation avec conscience est la perception[ndt 2] (perceptio). Une perception qui se rapporte simplement au sujet, comme modification de son état, est une sensation[ndt 3] (sensatio) ; une perception objective est une connaissance[ndt 4] (cognitio). La connaissance à son tour est ou intuition[ndt 5] ou concept[ndt 6] (intuitus vel conceptus). La première se rapporte immédiatement à l’objet et elle est singulière ; le second ne s’y rapporte que médiatement, au

  1. Vorstellung.
  2. Perception est le mot même que Kant emploie ici.
  3. Empfindung.
  4. Erkenntnisz.
  5. Anschauung.
  6. Begriff.