Page:Kant - Critique de la raison pure, II.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
139
DE L’UNION DE LA LIBERTÉ AVEC LA NÉCESSITÉ


sable, cette loi anéantirait nécessairement toute liberté, si l’on s’attachait obstinément à la réalité des phénomènes. Aussi ceux qui suivent ici l’opinion commune n’ont-ils jamais pu parvenir à accorder ensemble la nature et la liberté.


_________________


Possibilité de l’union de la causalité libre avec la loi générale de la nécessité naturelle


J’appelle intelligible ce qui, dans un objet des sens, n’est pas lui-même un phénomène. Si donc ce qui doit être considéré comme phénomène dans le monde sensible a en soi une faculté qui n’est pas un objet d’intuition sensible et par laquelle il peut être une cause de phénomènes, on peut alors envisager la causalité de cet être sous deux points de vue : comme intelligible, quant à son action, considérée comme celle d’une chose en soi, et comme sensible, quant aux effets de cette action, considérée comme phénomène dans le monde sensible. Nous nous ferions donc, de la faculté ou de la causalité d’un tel sujet, un concept empirique et en même temps aussi un concept intellectuel, qui se rencontreraient dans un seul et même effet. Cette double manière de concevoir la faculté d’un objet des sens ne contredit aucun des concepts que nous avons à nous faire des phénomènes et d’une expérience possible. En effet, comme ces phénomènes, n’étant pas des choses en soi, doivent avoir pour fondement un objet transcendental, qui les détermine comme simples représentations, rien n’empêche d’attribuer à cet objet