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ANALYTIQUE DU SUBLIME.


conforme à sa volonté, et par là il est délivré de toute crainte en présence de ces effets de la nature qu’il ne regarde plus comme des effets de la colère divine. L’humilité même, ou la condamnation sévère de ces défauts, qui peuvent d’ailleurs aisément trouver leur excuse, même aux yeux d’une conscience pure, dans la fragilité de la nature humaine, est une sublime disposition d’esprit qui consiste à se soumettre volontairement à la douleur des remords pour en détruire la cause peu à peu. C’est par là seulement que la religion se distingue essentiellement de la superstition ; celle-ci n’inspire pas à l’esprit le sentiment du respect pour le sublime, mais elle le jette, plein de crainte et d’angoisse, aux pieds d’un être tout-puissant, à la volonté duquel l’homme effrayé se voit soumis, sans pourtant lui accorder son respect ; aussi la flatterie et les hommages intéressés prennent-ils alors la place de la religion qui convient à une bonne vie.

La sublimité ne réside donc en aucun objet de la nature, mais seulement dans notre esprit, en tant que nous pouvons avoir conscience d’être supérieurs à la nature qui est en nous, et par là aussi à la nature qui est hors de nous (en tant qu’elle a de l’influence sur nous). Toutes les choses qui excitent ce sentiment, et de ce nombre est la puissance de la nature qui provoque nos forces, s’appelle alors (quoique improprement) sublime ; ce