Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome premier.djvu/239

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de nous devait toujours partir des premiers commencements, si d’autres ne nous avaient précédés dans la même voie, non pas pour ne laisser à leurs successeurs que le rôle d’imitateurs, mais pour nous aider par leur expérience à chercher les principes en nous-mêmes, et à suivre le même chemin, mais avec plus de succès. Dans la religion même, où chacun doit certainement tirer de lui-même la règle de sa conduite, puisque chacun en demeure responsable et ne peut reporter sur d’autres, comme sur ses maîtres ou ses prédécesseurs, la faute de ses péchés ; les préceptes généraux qu’on peut recevoir des prêtres ou des philosophes, ou qu’on peut trouver en soi-même, n’ont jamais autant d’influence qu’un exemple historique de vertu ou de sainteté, qui n’empêche pas l’autonomie de la vertu, fondée sur la véritable et pure idée (a priori) de la moralité, et qui ne la change pas en une imitation mécanique. Suivre[1] ce qui suppose quelque chose qui précède, et non imiter[2], c’est le mot qui convient pour exprimer l’influence que peuvent avoir sur d’autres les productions d’un auteur devenu modèle ; et cela signifie seulement, puiser aux mêmes sources où il a puisé lui-même, et apprendre de lui comment il faut s’en servir. Mais, par cela même que le jugement du goût ne

  1. Nachfolge.
  2. Nachahmung.