Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome premier.djvu/256

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moralité, je puis aussi attribuer à chacun cette satisfaction, mais seulement au moyen de la loi morale, laquelle de son côté est fondée sur des concepts de la raison.

Mais le plaisir du beau n’est ni un plaisir de la jouissance, ni celui d’une activité conforme à des lois, ni celui d’une contemplation raisonnant d'après des idées, mais un plaisir de simple réflexion. Sans avoir pour guide une fin ou un principe, il accompagne la commune appréhension d’un objet, telle qu’elle résulte du concours de l’imagination, en tant que faculté de l’intuition, et de l’entendement, en tant que faculté des concepts, au moyen d’une certaine application du Jugement, qu’exige aussi l’expérience la plus vulgaire : seulement, tandis que, dans ce dernier cas, le Jugement a pour but d’arriver à un concept objectif empirique, dans le premier (dans le j ugement esthétique), il n’a d’autre but que de percevoir la concordance de la représentation avec l’activité harmonieuse de ces deux facultés de connaître s’exerçant en liberté, c’est-à-dire de sentir avec plaisir l’état intérieur occasionné par la représentation. Ce plaisir doit nécessairement reposer en chacun sur les mêmes conditions, puisque ce sont les conditions subjectives de la possibilité d’une connaissance en général, et que la concordance de ces deux facultés de connaître, qui est exigée pour le goût, doit être exigée aussi d’une intelligence ordi-