Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome premier.djvu/261

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esprit étendu, en sachant s’élever au-dessus des conditions particulières et subjectives du Jugement, auxquelles tant d’autres restent pour ainsi dire cramponnés, et en se plaçant, pour réfléchir sur son propre jugement, à un point de vue universel (qu’il ne peut déterminer qu’en se plaçant au point de vue d’autrui). La troisième maxime, celle qui veut que la pensée soit conséquente avec elle-même, est très-difficile à suivre, et on ne peut y parvenir que par l’union des deux premières et grâce à une habitude acquise par une longue pratique de ces maximes. On peut dire que la première de ces maximes est celle de l’entendement ; la seconde, celle du Jugement ; la troisième, celle de la raison. —

Je reprends le fil interrompu par cet épisode, et je dis que l’expression de sens commun (sensus communis)[1] convient mieux au goût qu’à l’intelligence commune, au Jugement esthétique qu’au Jugement intellectuel, si on veut entendre par le mot sens un effet de la simple réflexion sur l’esprit, car alors on entend par sens le sentiment du plaisir. On pourrait même définir le goût la faculté de juger de ce qui rend propre à être universellement partagé le sentiment lié, sans le secours d’aucun concept, à une représentation donnée.

  1. On pourrait désigner le goût par sensus communis æstheticus, l’intelligence commune par sensus communis logicus.