Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome premier.djvu/303

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génie et pour ceux-ci les beaux-arts ne sont plus qu’une, imitation dont la nature a donné la règle parle génie.

Mais cette imitation devient de la singerie[1] quand l’élève imite tout, jusqu’aux choses que le génie n’a laissées passer, malgré leur défectuosité, que parce qu’il ne pouvait les retrancher sans affaiblir les idées. Il ne faut voir là un mérite que pour le génie ; une certaine hardiesse dans l’expression et en général certains écarts loin de la règle commune ne lui messiéent pas, mais ne sont point choses à imiter. Ce sont toujours des fautes qu’il faut chercher à éviter, tout en les pardonnant au génie dont une inquiète circonspection compromettrait l’originalité. Le maniéré[2] est une autre espèce de singerie, qui consiste dans cette fausse originalité, par laquelle on s’éloigne autant que possible des imitateurs, sans pourtant posséder le talent d’être soi-même un modèle. — Il y a en général deux manières (modi) de composer ses pensées : l’une s’appelle manière (modus estheticus), l’autre méthode (modus logicus) ; elles diffèrent l’une de l’autre en ce que la première n’a d’autre mesure que le sentiment de l’unité dans l’exhibition, tandis que la seconde suit des principes déterminés. La première seule, par conséquent, s’applique aux beaux-arts.

  1. Nachäffung.
  2. Das Manieriren.