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Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/22

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CRITIQUE DU JUGEMENT TÉLÉOLOGIQUE


compris les propriétés des nombres, avec lesquels l’esprit joue dans la musique). Cet enthousiasme l’élevait au-dessus des concepts de l’expérience dans la région des idées, qui ne lui paraissaient explicables que par un commerce intellectuel avec le principe de tous les êtres. Il n’est pas étonnant qu’il ait exclu de son école ceux qui étaient ignorants en géométrie ; car, ce qu’Anaxagore concluait des objets de l’expérience et de leur liaison finale, il pensait le tirer d’une intuition pure, inhérente à l’esprit humain. La nécessité dans la finalité, c’est-à-dire la nécessité des choses qui sont disposées comme si elles avaient été faites à dessein pour notre usage, mais qui semblent pourtant appartenir originairement à l’essence des choses, sans avoir égard à notre usage, voilà le principe de la grande admiration que nous cause la nature ; moins encore en dehors de nous que dans notre propre raison. Aussi est-ce une erreur bien pardonnable de passer insensiblement de cette admiration au fanatisme.

Mais, quoique cette finalité intellectuelle soit objective (et non subjective, comme la finalité esthétique), on ne peut la concevoir, quant à sa possibilité, que comme formelle (non comme réelle), c’est-à-dire que comme une finalité à laquelle il n’est pas nécessaire de donner une fin, une téléologie pour