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DEUXIÈME PARTIE

DE LA LUTTE DU BON PRINCIPE AVEC LE MAUVAIS POUR LA DOMINATION SUR L’HOMME




Pour devenir un homme moralement bon, il ne suffit pas de se borner à laisser se développer sans obstacle le germe de bien inhérent à notre nature, mais il est encore nécessaire de lutter contre une cause du mal, à tendances contraires, que rems trouvons également en nous ; c’est là ce que, parmi tous les moralistes de l’antiquité, les Stoïciens particulièrement ont voulu nous faire connaître en adoptant pour mot de ralliement le terme de vertu, qui signifie (en grec comme en latin) à la fois courage et vaillance, et suppose, par conséquent, un ennemi. Ainsi compris, le terme de vertu est un nom magnifique auquel ne peuvent nuire ni l’abus fanfaron qu’on en a fait souvent, ni les moqueries dont an l’a criblé (comme récemment le terme « lumières » Aufklärung). — Demander en effet qu’il montre du courage, c’est déjà pour moitié en inspirer à l’homme ; tandis que la paresseuse et pusillanime façon de penser qui consiste à se défier entièrement de soi-même et à compter sur un secours étranger (en morale et en religion) énerve toutes les forces de l’homme et le rend indigne de ce secours.