Page:Kant - Prolégomènes à toute métaphysique future, trad. Tissot, 1865.djvu/139

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2o
thèse :
Tout ce qui est dans le monde est composé de parties simples.
3o
thèse :
Il y a dans le monde des causes par liberté.
antithèse :
Il n’y a rien de simple ; tout est composé.
antithèse :
Il n’y a pas de liberté ; tout est nature.
4o
thèse :
Dans la série des causes cosmiques, il y a un être nécessaire.

antithèse :
Il n’y a rien de nécessaire ; dans cette série tout est contingent.

§ LIIa.

Voici le plus singulier phénomène de la raison humaine, dont on ne peut montrer ailleurs aucun exemple dans quelque autre des usages de cette faculté. Si, comme il arrive ordinairement, nous concevons les phénomènes du monde sensible comme des choses en soi, si nous regardons les principes de leur liaison comme ayant une valeur universelle par rapport aux choses en elles-mêmes, et non simplement par rapport à l’expérience, ainsi qu’il arrive d’ordinaire, inévitablement même sans notre Critique, il en sort une opposition inopinée qui ne peut jamais être conciliée par la voie dogmatique ordinaire, parce que thèse et antithèse peuvent être établies par des preuves également saisissantes de clarté et de force car pour ce qui est de la justesse de toutes ces preuves je n’en suis pas dupe —, et la raison se partage elle-même en deux, situation qui fait le triomphe du sceptique, mais qui doit porter le philosophe critique à la réflexion et à l’examen.