Page:Kant - Prolégomènes à toute métaphysique future, trad. Tissot, 1865.djvu/235

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a priori de la possibilité de tous les objets des sens, comme phénomènes, et par conséquent s’accorder avec eux. Le simple, dans la succession comme dans l’espace, est donc absolument impossible ; et si parfois Leibniz s’est exprimé de manière à ce qu'on pût quelquefois interpréter sa doctrine de l’être simple comme s’il avait entendu que la matière en fût composée, il est plus raisonnable de l’entendre, toutes les fois que les expressions le permettent, comme si, par simple, il concevait non une partie de la matière, mais le fondement tout à fait impercevable et à nous inconnu du phénomène que nous appelons matière (fondement qui peut bien être aussi quelque chose de simple, si la matière qui constitue le phénomène est un composé) ; ou, si les expressions ne s’y prêtent pas, on doit se refuser aux décisions de Leibniz même. Il n’est pas en effet le premier grand homme, pas plus qu’il ne sera le dernier qui doive s’accommoder de cette liberté d’autrui dans l’examen.

Le second vice est une contradiction si évidente que M. Eberhard doit nécessairement l’avoir remarquée ; mais il l’a déguisée de son mieux pour la rendre imperceptible : elle consiste à dire que le tout d’une intuition empirique est dans la sphère de la sensibilité, mais que les éléments de cette intuition sont complètement en dehors. Il ne veut donc pas que l’on donne par un raisonnement subtil (en quoi il se rapprocherait très fort de la Critique) le simple comme fondement des intuitions dans l’espace et le temps, mais il veut qu’on le trouve dans les représentations élémen-