Page:Kant - Prolégomènes à toute métaphysique future, trad. Tissot, 1865.djvu/291

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d’y toucher (car l’exemple qu’il en allègue ne convient pas à l’universalité de ce prétendu principe suprême de tous les jugements synthétiques). La cause : c’est qu’il voulait faire passer une règle logique, d’un caractère tout analytique, et distinct de toute qualité des choses, pour le seul principe naturel dont la métaphysique ait à s’occuper.

M. Eberhard doit avoir fini par craindre que le lecteur ait pu entrevoir l’illusion ; c’est pour cette raison qu’il dit à la fin de ce n° (p.331) que « la question de savoir si un jugement est analytique ou synthétique, est une question sans conséquence par rapport à sa vérité logique, » afin que le lecteur n’en entende plus parler. Mais c’est en vain. Le simple bon sens doit tenir fermement à la question dès qu’une fois elle lui a été présentée clairement. Que je puisse étendre ma connaissance au delà d’une notion donnée, c’est ce que m’apprend l’extension journalière de mes connaissances par l’expérience toujours croissante. Mais si l’on dit que je puis les étendre au delà des notions données, même sans le secours de l’expérience, c’est-à-dire que je puis juger synthétiquement a priori, et qu’on ajoute qu’il faut nécessairement pour cela quelque chose de plus que d’avoir ces notions, qu’il faut en outre un principe pour ajouter avec vérité à ce que je pense déjà par ces notions, je me moquerais de celui qui me dirait que cette proposition : Je dois avoir en dehors de ma notion quelque raison encore d’affirmer autre chose que ce qu’elle renferme, est le principe même qui suffit déjà pour